Les 27ème assises nationales des Entrepreneurs et Dirigeants Chrétiens se sont tenues à Marseille du 28 au30 mars. Le thème en était « Diriger et servir ».
Selon l ‘invitation,  ce thème devait conduire les participants à réfléchir  sur leur comportement de dirigeants – davantage que sur leurs actions – à la lumière de l’Evangile et de la pensée économique et sociale chrétienne.
Cette distinction subtile laisse un peu pensif !
De fait, l’expérience montre qu’il n’y a pas lieu de distinguer :

  • les managers par la seule place qu’ils occupent, et donc par leurs façons personnelles d’agir et de se comporter, exercent une influence déterminante sur la communauté dont ils ont la charge ;
  • mais au delà de leur personnalité, de leurs qualités ou défauts, il y a les orientations qu’ils prennent, les règles du jeu qui ont cours, les modes opératoires mis en œuvre. Et de tout cela, ils sont les premiers décisionnaires.

Les documents préparatoires à ces journées posaient quelques bonnes questions : Quelles institutions formelles ai-je ou non favorisées, pour mieux diriger ? Quelle équité, quelle éthique dans mes pratiques. 

Il y a des entreprises qui "élèvent" les hommes.
Elles ne se distinguent pas des autres par le rassemblement en leur sein d’êtres d’exception. Tout au plus se caractérisent-elles par la tâche prioritaire que se sont donnée leurs dirigeants :

  • mettre en place des modes de fonctionnement tels que les personnes soient en situation de donner le meilleur d’elles-mêmes, de s’améliorer, aient  intérêt à progresser;
  • la règle du jeu y est telle qu’elle favorise un art de bien vivre ensemble;
  • connue de tous, expliquée, elle s’impose à tous, dirigeants et collaborateurs;
  • elle est la boussole commune qui permet d’avancer et de corriger les écarts, de se rappeler à l’ordre.

Il y a donc lieu de distinguer l’institution entreprise des hommes qui l’animent. Car ‘dès lors qu’une institution existe, elle tend à produire toutes ses conséquences’.[1]

Instituer : là se situe le rôle majeur des dirigeants.

Cela exige une  claire compréhension des ressorts des motivations humaines et une philosophie du management qui s’incarnent dans les principes de vie commune animant l’entreprise.
L’absence de réflexion, la  non prise en compte de toutes les réalités en cause, conduisent à des entreprises où les règles du jeu, officielles ou officieuses mais pratiquées, engendrent repli sur soi, méfiance et individualisme égoïste ; où sont encouragés la médiocrité et le développement, sinon la naissance de défauts et de vices ; où organisation, procédures, règlements et normes étouffent toute initiative, tout pouvoir, toute autonomie ; où conscience professionnelle, souci du travail bien fait ont été écartés au profit de contrôles a priori ; où les systèmes de reconnaissance, les grilles de salaires et classifications ont ignoré délibérément le mérite personnel et la qualité des services rendus.

Certes, la finalité de l’entreprise, c’est le service rendu aux clients.  Mais la qualité du service est directement dépendante de la manière dont le personnel est ‘servi’. Tout dirigeant doit faire en sorte que son entreprise favorise la croissance professionnelle, intellectuelle, morale et spirituelle de ceux qui la fréquentent ; sinon elle est  un obstacle à leur valorisation. Les réponses à ces préoccupations conditionnent la fécondité de l’entreprise dans la durée. Dans une entreprise mal gouvernée, l’employé, pauvrement servi, servira pauvrement.  

 


[1]  Paul Boncour

Répondre à cet article