Les faits - Un cadre, directeur administratif et financier, exprime vivement par une note son désaccord avec les mesures prises par les dirigeants, représentants de l'actionnaire.

Il est licencié pour « perte de confiance ».

Les tribunaux donnent raison à l'employeur : un cadre est tenu au devoir de réserve et ne peut se désolidariser des décisions de sa direction. Le licenciement est confirmé.

L'affaire, de tribunal en cour, arrive en Cour de Cassation qui déclare infondé le licenciement du cadre en question ; non en raison du droit à la liberté d'expression, mais du fait que les propos - ni injurieux, ni diffamatoires, ni excessifs - avaient été réservés au cercle restreint du Comité de Direction dont le cadre était membre.

Mieux, la Cour de Cassation affirme que, du fait de sa position hiérarchique et de sa fonction de cadre dirigeant, l'intéressé avait en quelque sorte un devoir d'attirer l'attention et d'alerter, puisqu'il estimait que la pérennité de l'entreprise était en jeu.

Les conclusions - C'est en quelque sorte un devoir de critique que la Cour suprême reconnaît là, et ainsi il peut être reproché à un cadre de ne pas être assez critique sur les décisions ou agissements erronés de ses supérieurs hiérarchiques.

L'expérience de CPE-reseau - Il y a longtemps que des entreprises ont mis en oeuvre une ligne de conduite qui encourage chacun à signaler ce qui ne va pas.

Ainsi dans un groupe de 4500 personnes, le document-support aux entretiens d'appréciation des services rendus, mentionne dans la rubrique force de cohésion un « soutien des décisions prises » ; mais, dans la rubrique force de proposition, il est demandé au collaborateur qu'il « exprime critiques et désaccords avec des faits à la personne concernée ».

Bien sûr, il est précieux de sauvegarder la cohésion de l'entreprise. Les dissensions ouvertes ont des effets trop destructeurs sur le moral et l'efficacité pour ne pas être circonscrits. Mais il peut être tout autant dangereux de se taire sous prétexte de solidarité et de réserve ! C'est donc un service réel que rend celui qui met le doigt sur une défaillance ou une mauvaise décision, à condition de ne le faire qu'avec les personnes en cause.

Encourager l'esprit critique tout autant que la cohésion doit être une ligne force de la politique de l'entreprise. Simultanément : l'un ne va pas sans l'autre.

Répondre à cet article