LIBERTÉ DU TRAVAIL ET OCCUPATION DES LIEUX

   Une usine est occupée par des « travailleurs en grève ». 
   Des non grévistes s’organisent avec l’encadrement pour libérer les accès au nom de la « liberté du travail » et reprendre possession des lieux afin de servir les clients. Les occupants, relayés par des média complaisants, s’insurgent contre cet « inadmissible atteinte au droit de grève ». Cette pratique de l’occupation porte atteinte à une liberté essentielle, celle du travail.
  
   Il faut noter que si la grève est légale, l’occupation ne l’est pas.
   Avoir recours à la grève peut être légitime, suivant les circonstances. Mais l’exercice de ce droit ne peut aller à l’encontre d’un autre droit, tout aussi légal et légitime en toute situation, celui de travailler et de gagner sa vie. C’est à juste titre que les instances judiciaires ont depuis longtemps considéré  que les actions qui visent à interdire le libre accès des lieux de travail constituent une voie de fait. Elles contreviennent à un droit fondamental fort opportunément rappelé par l’article L 412-1 du code du Travail  à propos de l’exercice du droit syndical    « … reconnu dans toutes les entreprises dans le respect des droits et libertés garantis par la Constitution de la République, en particulier de la liberté individuelle du travail ».

   De telles actions sont donc illégales, et plus, anticonstitutionnelles ; par ailleurs, il est vain pour les occupants-grévistes de prétendre qu’elles sont « le seul moyen de faire aboutir leurs légitimes revendications ». Ces actes ne peuvent en aucun cas être motivés par une quelconque légitimité des buts poursuivis : la fin ne justifie pas les moyens. Le moyen est privatif d’une liberté majeure, qui plus est, antérieure au droit de grève, car pour faire grève, il faut d’abord avoir la liberté de travailler ! La liberté du travail prime donc le droit de grève. Cela n’est que simple bon sens.

   Si l’occupation met en cause la légale - et légitime - liberté du travail, elle est également une atteinte incontestable au tout aussi légitime droit de propriété de l’employeur. Elle présente donc les caractéristiques d’une double illégalité et illégitimité ; les exigences du droit positif et de la justice la plus naturelle sont bafouées : salariés et employeur sont lésés.

   Alors, le fait pour des non grévistes de s’assurer de la disponibilité  de leur lieu de travail est il une voie de fait attentatoire aux libertés ? Non puisque la liberté et le droit d’empêcher autrui de travailler sont formellement interdits.

   La grève avec occupation des lieux de travail ressort des méthodes éprouvées du syndicalisme révolutionnaire et politisé. Dans la grande tradition de 1936, revue en 1968, certaines organisations syndicales comptent-elles exploiter la morosité ambiante en défiant lois et pouvoirs publics ?

   Il reste que l’occupation d’une entreprise est une atteinte d’autant plus grave qu’elle entraîne une cessation au moins temporaire  de son activité. Ce qui peut conduire les clients à se tourner vers d’autres fournisseurs, et cela de façon définitive, en raison de l’incapacité à honorer les engagements pris. Même si les motifs de la grève sont justes, en empêchant le libre accès, les occupants fragilisent encore plus l’entreprise dont ils dépendent, puisque les non grévistes pourraient apporter à la clientèle le « service minimum » qu’elle est en droit d’attendre. Le risque couru est préjudiciable à tous : ce qui met en évidence la communauté d’intérêt et de destin existant entre salariés, clients et entreprise.

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