Des Etats-Unis, qui ont lancé il y a quelques années le courant "Ethique des affaires", est venu un ouvrage collectif : Human action in business, dont le thème central est que la morale est condition d'efficacité et de rentabilité.La disparition de toute forme d'honnêteté dans les affaires entraîne des surcoûts pour les entreprises : mise en place de systèmes de protection  coûteux pour éviter  vols,  effractions et sabotages, inflation juridique dans la rédaction des contrats, réglementation forcenée pour encadrer les relations sociales, engorgement des institutions judiciaires... Ce livre prône un retour aux références morales de base nécessaires à la vie commune. Afin que cesse la multiplication des prothèses – lois, contrôles, réglementations – sensées pallier les carences de la société.  

   L'honnêteté coûte moins cher que l'immoralité, « l'éthique est génératrice de profits ». L'intérêt de chacun est donc de fonctionner dans la confiance mutuelle. Il conviendrait, dès lors, de rétablir la morale dans les affaires.

   Soit. Mais cette volonté affichée débouche, le plus souvent, sur des chartes qui mettent au ban corruption ou  vente forcée, proclament considération pour le client, respect pour les collaborateurs...Une telle pratique consiste, de fait, à se donner un label de qualité, une image publicitaire très éloignés des  réalités que le quotidien de bien des entreprises révèle.

   Car la morale n'est pas d'abord question de  prédication ou de déclaration d’intention  mais de  façon d'agir.
   Elle n'est pas d'abord du domaine du « dire » mais du « faire ».

Bien sûr, il faut que (yaka) les employés soient honnêtes, que les commerciaux ne fassent pas des contrats à l'arraché, il faut être franc, loyal, serviable. La vie sociale est ainsi rendue plus aisée. Mais les conditions pour cela sont-elles réunies ?

          * L'acheteur contraint d'obtenir des rabais importants - parce qu’apprécié et sanctionné sur ce critère - est il en mesure d'avoir un comportement moral à l'égard de son « partenaire » sous-traitant ? Par voie de conséquence, faudra-t-il s'étonner si ce dernier cherche à biaiser quant à l'exécution du cahier des charges qu'il a accepté pour ne pas disparaître ?

          * Le directeur d'établissement qui doit tenir un budget prévisionnel sous peine d'être mal jugé par sa direction, n'est-il pas mis dans une situation où il a intérêt à « lisser » ses résultats, à tricher avec l'entrepris ?

          * Le collaborateur qui se voit désavoué dans une décision qu'il a prise n'a t-il pas intérêt personnel à laisser passer, à se démobiliser, à magouiller, à « tirer au flanc » ?

          * Le commercial en quête désespérée de contrats - c'est une question de fins de mois ou de réputation - ne peut-il pas être tenté de se laisser « corrompre » par un client ?

          * Que ne pourrait-on dire de la pratique des marchés publics avec l'usage du « moins-disant », des fiscalités écrasantes mises en oeuvre qui incitent à transférer sièges sociaux et emplois, dépenser toutes les énergies à frauder...

La question est de savoir si les lignes de conduite qui inspirent les modes de fonctionnement de toute communauté favorisent ou non les comportements moraux. C'est une affaire de politique, ou art de faire vivre ensemble personnes et  sociétés. Elle est du ressort des gouvernants. Pour cela ils doivent être convaincus que l'être humain, s'il n'est pas intrinsèquement vicieux, n'est pas fondamentalement vertueux et qu'il convient de ne pas encourager ses faiblesses.

 

 

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